Est-ce que le deuil, ça doit se vivre en silence ?

Est-ce que le deuil, ça doit se vivre en silence ?

Est-ce que ça doit se taire ?
Est-ce que c’est encore plus tabou qu’une paire de boobs, même si Facebook ne censure pas les photos de cierges ?
Est-ce que c’est impudique, de parler de son deuil en public ?
Est-ce que c’est une chose qu’on doit régler entre soi et soi, en famille, dans l’intimité ?


C’est une douleur à la fois si intime et tellement universelle.

 

Je ne pose pas la question pour moi.

Je me fous qu’on me juge sur ce que je fais : je fais toujours ce qui est juste pour moi, et quand ça ne me va plus, je fais autrement, c’est aussi simple que ça.

 

J’ai l’habitude d’être jugée juste parce que je respire, parce que je fais 1m75 et que je porte des talons, parce que j’ai les cheveux rouges, parce que je suis mère célibataire, parce que je montre mes décolletés plongeants sur les réseaux sociaux,  parce que je ris trop fort, parce que j’existe, parce que j’écris des livres.


Et pour tellement d’autres raisons, dont sans doute un paquet que je ne soupçonne même pas.
Parce que je suis libre, surtout.
Et qu’être jugée parce que je suis libre me donne la liberté de m’en foutre royalement.


Je pose la question plus largement.


J’ai parlé « naturellement » de l’accident de ma mère sur les réseaux sociaux.
Parler, écrire, ça me sauve la vie depuis toujours.
Ça m’a toujours sauvé la vie.
Quand tout cela est arrivé, j’ai eu besoin d’en parler, d’échanger, d’écrire, de partager.
Je mets « naturellement » entre parenthèses car bien sûr je me suis demandé si ça se faisait, si c’était approprié.
Et puis j’ai décidé que ce qui importait, c’est que je fasse ce qui me convenait à moi.
J’ai reçu, du coup, de très nombreux témoignages, en commentaire ou en MP.
Et j’ai pu mesurer à quel point le besoin de s’exprimer était fort pour tous.

Était le dénominateur commun pour tous.

Si la mort de ma mère a causé une immense douleur, elle m’a également appris beaucoup.

Je n’ai plus peur de la mort, pour la première fois de ma vie - j’allais écrire « toute première fois », mais Jeanne Mas s’est mise à chanter dans ma tête.


Je n’ai plus peur de la mort parce que je rejoindrai ma mère, mes grands-parents, et tellement d’autres que j’ai aimés.

Et, surtout, je n’ai plus peur parce que je sais que comme moi ma fille aura la force, l’élan vital, l’envie de continuer quoiqu’il arrive.
J’en ai acquis la conviction profonde en traversant cela.
Car malgré le chagrin, je me sens plus forte que jamais.

Par ricochet, je n’ai plus peur de parler de la mort, de l’envisager, de l’inclure à tout le reste.
Je ne trouve plus ça glauque, morbide, à fuir.

Car c’est cela, je pense, qui nous plonge dans une douleur infinie : qu’on fasse semblant que la mort n’existe pas, alors que s’il y a UNE chose qui nous unit tous, c’est celle-là.

Alors, en l’attendant, est-ce que ça ne serait pas mieux de vivre en parlant de tout ce qui nous chante comme ça nous chante, et en guérissant au mieux pour mourir en pleine forme ?

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